Centre de transfusion sanguine du Burkina : « Il faut vite agir pour préserver la vie des populations », alerte la coordination syndicale de la santé

Publié le lundi 13 mars 2023 à 18h34min

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Centre de transfusion sanguine du Burkina : « Il faut vite agir pour préserver la vie des populations », alerte la coordination syndicale de la santé

La coordination nationale du Syndicat des travailleurs de la santé humaine et animale, section Centre national de transfusion sanguine (SYNTSHA/CNTS) était face à la presse ce lundi 13 mars 2023 à Bobo-Dioulasso. Au cours de cette rencontre avec les professionnels de médias, elle a dénoncé les conditions déplorables dans lesquelles les agents travaillent depuis quelques temps.

« La qualité du service est très importante au niveau du Centre national de transfusion sanguine. C’est un aspect à ne pas négliger si nous voulons réellement sauver des vies », a lancé Bernardin Sanou, coordonnateur national du Syndicat des travailleurs de la santé humaine et animale, section CNTS). Face à cette « situation déplorable » qui, dit-il, met en danger la vie des populations, la coordination a décidé de tirer la sonnette d’alarme. Elle a fait savoir son amertume au cours d’une conférence de presse tenue ce lundi 13 mars à Bobo-Dioulasso.

Selon la coordination, l’heure est grave et il faut vite agir pour préserver la vie des populations. Le porte-parole des conférenciers, Léonard Yaméogo, dans la lecture de sa déclaration, a d’emblée rappelé la situation critique au sein du CNTS. Selon lui, la situation actuelle au niveau du centre est « regrettable et déplorable » après une vingtaine d’années de fonctionnement tant au niveau de la gestion que de l’organisation.

Le coordonnateur national du SYNTSHA/CNTS, Bernardin Sanou, interpelle les autorités du pays à se pencher sérieusement sur les maux qui minent le CNTS

Cet état de fait se traduit par, entre autres, une insuffisance criarde de matériels et consommables indispensables au bon fonctionnement des structures opérationnelles ; une gestion financière non rationnelle ; une exploitation esclavagiste des travailleurs par des programmes de roulement et de collectes insupportables ; la rupture et la mauvaise qualité des kits de collation et du matériel.

A en croire les conférenciers, ce dernier point obligeait les agents collecteurs à effectuer des collectes de sang sans sardines, ni eau, ni pain. Dans certains cas, les agents étaient obligés de payer l’eau et le pain, dans l’optique de sauver la collecte et maintenir le partenariat avec les organisateurs.

« Au pire des cas, ces collectes se tiennent avec de la boisson qui avait des dates de péremption très proche ainsi qu’avec de la sardine de mauvaise qualité », a déploré la coordination syndicale. Elle dénonce aussi la mise en circulation de poches de sang avant même que la direction de la qualité et de la vigilance n’effectue le test de contrôle qualité. Selon le porte-parole Léonard Yaméogo, malgré l’interpellation de l’administration par le SYNTSHA, la directrice générale et son équipe continuent de fouler au pied la qualité pourtant une des conditions non négociables pour une structure aussi sensible qu’est le CNTS.

Les conférenciers ont relevé également le manque de personnel qui freine ainsi les activités du centre. Dans sa plateforme minimale, le SYNTSHA avait demandé le renforcement des ressources humaines par l’augmentation des effectifs des agents, la réduction du nombre de donneurs par préleveurs.

Une doléance qui serait restée sans suite. « Cela contraint les agents à se surpasser pour faire fonctionner le service, travaillant ainsi 7jours/7 et sans repos de garde. Cette insuffisance en personnel va s’accroître encore cette année 2023 avec l’admission de certains agents au concours professionnels », a-t-il dit. Et d’insister sur les pannes récurrentes des automates des laboratoires qui ne sont pas sans conséquences sur la santé des malades car, dit-il, cette situation entraîne systématiquement des ruptures des produits sanguins labiles dans les formations sanitaires.

Les participants à la conférence de presse du SYNTSHA/CNTS à Bobo-Dioulasso

Pour la coordination, la passation des marchés au CNTS est un véritable chaos. Elle en veut pour preuve « l’acquisition de matériels de très mauvaise qualité comme par exemple les poches de collecte de marque DONO PACK. Ce qui donne l’impression que le CNTS est devenu le dépotoir des fournisseurs avec la bénédiction et la complicité de l’administration générale ». A cela s’ajoute aussi la rupture répétitive de réactifs. « Cette rupture peut s’étendre à des dizaines de jours livrant ainsi les patients dans un état critique et les travailleurs dans un grand désarroi avec de multiples sollicitations de la population », déplore Léonard Yaméogo. Selon lui, cette situation pouvait être évitée si des mesures adéquates et appropriées étaient mises en place par l’administration.

L’autre point aussi important que les autres est lié à la remise en cause des acquis des travailleurs et les retards de paiement des frais de mission des travailleurs. Pour le coordinateur national, Bernardin Sanou, les agents du CNTS bénéficient de la prime de motivation comme inscrit dans le protocole d’accord SYNTSHA-Gouvernement de Mars 2017. « Malheureusement, nous assistons à une remise en cause de cet acquis par la prise unilatérale des arrêtés de septembre 2020 puis de juillet 2022, avec une exclusion volontaire des partenaires sociaux dans l’élaboration desdits textes. Le SYNTSHA dénonce cette forfaiture de la part de l’administration et exige des arrêtés conformes aux aspirations des travailleurs », a-t-il fait savoir.

Le porte-parole des conférenciers, Léonard Yaméogo, décrit les conditions de travail des agents au sein du CNTS

Avant de poursuivre : « Concernant les frais de mission, les travailleurs sont obligés d’effectuer les missions de collecte à crédit et attendre des mois (2 à 3 mois) avant de rentrer en possession de leur dû. Cette situation perdure depuis des années et ne fait que s’empirer. Pour cette année 2023, il existait déjà des arriérés de frais de mission de janvier et février, il a fallu encore que le SYNTSHA monte au créneau avant que les valeureux travailleurs ne puissent rentrer en possession de leur dû ».

C’est face à cette « gestion chaotique » que les membres syndicats disent avoir pris leur responsabilité. Refusant d’être complice de la dégradation de la qualité des services, ces membres ont décidé de dénoncer et condamner cette forfaiture.
Ils exhortent l’administration du CNTS à se pencher sérieusement sur cette situation qui n’a que trop durer. Aussi ils interpellent le ministère de la Santé et de l’hygiène publique ainsi que le gouvernement à se pencher sérieusement sur les maux qui minent le CNTS. « Dans un délai raisonnable et sans évolution favorable de la situation, les travailleurs du CNTS prendront des mesures légitimes pour la prise en compte de leurs revendications », préviennent-ils.

Romuald Dofini
Lefaso.net

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