Industries de Bobo-Dioulasso : Les usines meurent sous le poids de la fraude

Publié le mercredi 2 août 2017 à 13h33min

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Industries de Bobo-Dioulasso : Les usines meurent sous le poids de la fraude

Le lundi 31 juillet 2017, Paul Kaba Thiéba lors d’un court séjour dans la ville de Bobo-Dioulasso, a visité trois unités industrielles à savoir la société de transformation des noix d’acajous (ANATRANS), la société africaine de pneumatiques (SAP Olympic) et la société WINNER. Cette visite lui a permis de toucher du bout du doigt les nombreuses difficultés qui minent ces usines.

De ces trois unités industrielles, la société de transformation des noix d’acajous (ANATRANS) est la première à avoir accueilli la forte délégation avec à sa tête le chef du gouvernement Paul Kaba Thiéba. Cette visite initiée par le PM, avait pour objectif d’une part, d’aller féliciter et encourager tous ces braves travailleurs qui contribuent à accroitre l’économie nationale, et d’autre part s’enquérir des maux qui minent ces unités de transformation dans la ville de Sya.

De la zone de décorticage, de depelliculage, en passant par la zone de classification à celle d’emballage, la délégation a pu réaliser le travail à la chaine qui se fait dans cette unité industrielle. Et le Premier ministre en est sorti impressionné. « J’ai été impressionné par ce que j’ai vu car s’est exactement ce que nous voulons faire dans le cadre de la mise en œuvre du Plan National de Développement Economique et Social (PNDES), à savoir la transformation de nos produits agricoles », a-t-il laissé entendre.

Avant d’exprimer ses sentiments de satisfaction de cette visite et la volonté de son gouvernement à accompagner cette unité industrielle de transformation d’anacarde pour l’exportation.

« Non seulement les produits exportés rapportent des recettes d’exportation à l’Etat, mais également dans cette usine, j’ai été impressionné de voir toutes ces femmes qui travaillent ici.
Grâce aux salaires qu’elles gagnent, elles pourront ainsi soutenir leurs familles et cela va permettre de lutter contre la pauvreté. Et c’est une initiative que nous devrons soutenir ».

Aussi, il a tenu à féliciter le responsable de cette usine et tous les travailleurs qui y sont. Cependant, il a affiché la volonté de son gouvernement de prendre toutes les mesures qu’il faut pour soutenir la filière anacarde.

Par ailleurs, des échanges avec les responsables de la société ANATRANS, il ressort que le Burkina Faso produit environ 70 milles tonnes d’anacarde par an alors que le potentiel est là pour produire des valeurs considérables. D’où la nécessité de rechercher des mesures idoines pour augmenter le rendement et tirer donc plus profit de cette filière.

Après cette société, cap est mis sur celle de la SAP et WINNER qui rencontrent aujourd’hui d’énormes difficultés surtout du fait de la fraude. Ainsi, le PM est allé échanger avec les acteurs de ces sociétés pour trouver des issues de sortie de crise.

En effet, selon le DG de la société africaine de pneumatiques, Niaoné Hayouba, cette société a été créée en 1972 et a effectivement démarré ses activités de production en février 1974. Basée dans un pays enclavé, la Sap Olympic, comme la plupart des sociétés industrielles burkinabè a connu et continue de connaître d’énormes difficultés d’ordre existentiel. Au rang de ces difficultés on peut citer entre autres la pratique de la concurrence déloyale sur ses marchés.

A en croire le DG, les marchés de la Sap sont envahis par des produits concurrents d’origine essentiellement asiatique, souvent de mauvaise qualité, mais toujours vendus à des prix imbattables grâce à des pratiques frauduleuses de toutes sortes. Et cet état de fait a pour conséquence la réduction de jour en jour des parts de marché de la Sap avec à la clé, des fréquentes périodes de méventes de ses produits comme c’est le cas actuellement où la société dispose de près d’un milliard quatre cent millions (1 400 000 000) de francs CFA de produits finis en magasin. « Cela oblige notre entreprise à fonctionner principalement en une seule équipe avec un effectif de deux cent quatre vingts (280) travailleurs au lieu des trois équipes possibles pour au moins cinq cents (500) travailleurs », a-t-il déploré.

Même constat au niveau de Winner Industrie, selon sa DG madame Traoré/Ouédraogo Fati. Contrairement à la Sap, les « machines » dans cette société ne tournent plus et les travailleurs se retrouvent dans le chômage technique et sans salaire depuis plus d’une année déjà. Une situation que déplore le PM.
« C’est vraiment difficile de venir trouver cette usine fermée et de voir plus de 120 pères de famille sans travail, c’est une situation difficile et cela nous donne des pincements au cœur ».

Prenant la parole au nom du personnel, le délégué Ouédraogo Ibrahim a laissé entendre que Winner industrie traverse une crise consécutive à une gestion opaque et familiale dont elle fait l’objet depuis la prise de fonction de la DG en 2001. Il a aussi fait savoir que la société n’a ni matières premières, ni produits finis. « Tous les comptes de trésorerie sont vides, aucune créance à recouvrer, avec en sus un passif énorme dont près de 800 millions à l’Etat et des dettes fournisseurs de près de 600 millions », s’est indigné ce dernier.

Dans une telle situation, la prise d’un certain nombre d’actions s’avère indispensable. Il s’agit aussi bien d’actions en interne que d’appuis externes. Ainsi, à la lumière des constats effectués par le Premier ministre en visitant ces unités industrielles dans la région, il est à noter que le problème est « un problème transversal » auquel le gouvernement doit s’attaquer.

« En tant que pays enclavé, si la fraude venait donc à envahir notre marché, nos unités industrielles seront asphyxiées. Cela va contraindre donc le Burkina Faso à être un pays désindustrialisé et nous condamnera à être les consommateurs des produits des autres pays.Ce qui n’est pas acceptable », a dit Paul Kaba Thiéba.

Toutefois, il a affirmé que le pays a l’ambition de mettre en place une économie solide articulée sur ce que nous avons comme richesse nationale notamment l’élevage, l’agriculture mais également les industries de transformation agro-alimentaire.
« Le gouvernement prendra donc toutes les mesures pour protéger le marché national contre la fraude et permettre aux unités industrielles de mener une compétition tout à fait loyale avec les exportateurs étrangers et de protéger le marché intérieur », a conclu le PM.

Romuald Dofini
Lefaso.net

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