Agriculture du Burkina : « Les femmes ont remplacé les hommes dans les champs », déplorent les femmes de la commune de Bama

Publié le mercredi 30 août 2017 à 19h06min

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Agriculture du Burkina : « Les femmes ont remplacé les hommes dans les champs », déplorent les femmes de la commune de Bama

Au Burkina Faso, les femmes participent largement à la production agricole et à la transformation des produits. Ainsi, leur rôle est essentiel dans le développement de la sécurité alimentaire. Pourtant elles jouissent rarement des mêmes droits que les hommes, notamment en ce qui concerne la propriété terrienne et les aides de l’état burkinabè. Toutefois, elles déplorent le fait que ce sont les femmes qui ont remplacé les hommes dans les champs. Une situation qui indigne ces dernières.

Aujourd’hui, l’agriculture constitue un moyen de subsistance pour bon nombre de femmes au Burkina Faso. En effet, elles participent de manière considérable à l’économie rurale dans presque toutes les régions du pays. Ainsi, au cours d’une visite de presse organisée les jeudi 13 et vendredi 14 juillet 2017 par le secrétariat permanent des organisations non gouvernementales (SPONG) dans les communes de Bobo-Dioulasso et de Bama, nous avons accosté certaines femmes de la commune de Bama, notamment les étuveuses de riz. De cette rencontre, elles ont déploré le fait que ce sont les femmes qui ont remplacé les hommes dans les champs. Une situation qui indigne ces dernières.

La présidente de l’union des femmes étuveuses de riz, madame Sawadogo Mariam

Selon elles, dans la commune de Bama, les femmes reçoivent en général une partie très faible de terre cultivable, du crédit, de la formation ou de l’information agricole, « ce qui n’est pas normal », a laissé entendre la présidente de l’union des femmes étuveuses de riz, madame Sawadogo Mariam, d’un air sérieux.

« Aujourd’hui, si on veut bien voir, ce sont les femmes qui travaillent beaucoup plus dans les champs. Les femmes ont remplacé les hommes dans les champs », a-t-elle déploré.Avant d’ajouter : « Nous avons fait le constat sur la route de Ouaga-Bobo. Si vous prenez la route, c’est uniquement les femmes vous allez voir dans les champs avec leurs enfants et même s’il y a un homme, souvent il est assis sous les arbres et c’est lui qui joue le rôle de baby-sitter pendant que la femme et les enfants travaillent ».
« Si vous allez dans nos champs actuellement, vous allez faire le constat, uniquement que des femmes », a lancé une autre comme pour appuyer les propos de sa présidente.

Pour elle, les femmes sont le pilier du développement de l’agriculture au Burkina Faso et particulièrement dans la commune de Bama ; car travaillant beaucoup plus dans les champs. A en croire ces dernières, ce sont elles qui font tout aujourd’hui, les charges des enfants, éducations, santé.

Madame Zonou Fatimata, coordinatrice du groupement des femmes de Bama

Certes, elles travaillent plus mais attirent très peu l’attention des autorités et ne reçoivent que très peu d’aide. Une situation que plus d’une femme ont déplorée.
« Malgré le rôle et l’influence des femmes, celles-ci continuent à bénéficier d’un appui bien inferieur à celui des hommes.Chaque fois nous voyons à la télé que ce sont les hommes qui bénéficient des kits de travail (des bœufs, des charrues, etc.,). L’année dernière par exemple, les femmes de la commune n’ont reçu qu’un seul bœuf. Un bœuf pour toutes les femmes de la commune de Bama », a confié madame Zonou Fatimata, coordinatrice du groupement des femmes de Bama.

Selon elle, lors des rencontres souvent, les femmes n’ont pas droit à la parole pour exprimer leurs besoins et « pourtant nous avons des besoins et nous aimerions pouvoir les exprimer », a souhaité la présidente des étuveuses de riz. Toutes à l’unanimité ont reconnu que les femmes manquent de terre cultivable, de matériels, de formation et surtout de conseils pour le suivi de leurs productions.
On pourrait penser que l’une des raisons pour lesquelles, ces femmes sont largement exclues de la prise de décisions au sein de leurs communautés et sous-représentées dans des rôles, tient à leur taux élevé d’analphabétisme.

Une nouvelle vision pour ces femmes productrices

Le directeur régional de l’agriculture et des aménagements hydrauliques des Hauts-Bassins, Sitégné Hien

A en croire le directeur régional de l’agriculture et des aménagements hydrauliques des Hauts-Bassins, Sitégné Hien, rencontré dans le cadre de cette visite de presse, cette situation (des femmes) est en train de changer parce qu’elles sont à l’avant garde des efforts visant à transformer le paysage agricole du Burkina Faso. « Dans les activités que le ministère mène, de façon globale c’est vraiment pour le développement de l’agriculture au niveau de la région. Dans le développement de l’agriculture justement il y a beaucoup d’aspects qui rentrent en ligne de compte. Et précisément pour les petits producteurs (qui regroupent les jeunes et les femmes), je crois que beaucoup d’efforts sont consentis par le ministère à l’endroit de ces petits producteurs. Les intrants, les engrais et les semences sont beaucoup plus orientés vers les petits producteurs car se sont eux qui sont beaucoup plus vulnérables », a laissé entendre ce dernier.

Par ailleurs, plusieurs organisations ont créé des programmes de micro financement qui offrent une formation, des conseils techniques et des crédits aux agricultrices burkinabè pour leur accompagnement.

Toutefois, des efforts restent toujours à consentir à l’endroit des agriculteurs en général et des petits producteurs en particulier et notamment les femmes pour une agriculture prospère au Burkina Faso. Car comme le disait un expert des questions genre et développement rural : « investir dans l’autonomisation des femmes dans l’agriculture, c’est un raccourci intelligent dans le cadre de la lutte contre la pauvreté en milieu rural ».

Romuald Dofini
Lefaso.net

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